Fondée en 2013, DECIEM — la société mère des marques de soins de la peau The Ordinary et NIOD — est depuis cette année une filiale à 100% de The Estée Lauder Companies. Entre 2017 et 2024, le groupe Estée Lauder a déboursé, au total, 1,7 milliard de dollars pour prendre le contrôle de la jeune entreprise. Dans ce nouveau cadre, la petite start-up canadienne devenue un géant mondial de la beauté, se donne désormais pour mission de devenir le numéro 1 mondial du skincare. Premium Beauty News s’est entretenu avec Nicola Kilner, CEO et cofondatrice de DECIEM, sur sa stratégie et ses projets pour faire de The Ordinary une marque de soins toujours plus culte.
« Je suis extrêmement fier que nous soyons toujours une organisation qui s’appuie sur la science dans toutes ses décisions », explique Nicola Kilner. « Les produits et les campagnes émanent de notre équipe scientifique, puis sont transmis à l’équipe marketing. J’ai le sentiment que nous avons su donner la priorité à ce qui est juste en termes d’innovation scientifique, de besoins des consommateurs et de transparence, et que nous continuons de le faire. »
C’est cela, indique-t-elle, qui est essentiel pour réussir dans le monde ultra-concurrentiel de la beauté d’aujourd’hui, en particulier au moment où les projets de croissance s’intensifient.
Encore « surpondérée en ligne »
Interrogée sur la manière dont DECIEM souhaite équilibrer ses ventes en ligne et en magasin, Nicola Kilner explique que The Ordinary, par exemple, reste « surpondérée en ligne » dans les ventes de ses partenaires détaillants et que le commerce électronique constitue la majorité des ventes de la marque en Europe et en Amérique du Nord. En France, par exemple, les ventes de The Ordinary sont à 80% réalisées en ligne, contre 20% en magasin. Pour la CEO, la promotion des canaux de vente en ligne restera donc un point essentiel du plan de croissance de The Ordinary.
« Nous faisons beaucoup avec nos partenaires actuels, qui sont des partenaires très forts pour nous. Nous avons prévu de nombreuses activations en ligne (…) des activations significatives que nous essayons de promouvoir tout en conservant une approche éducative », déclare-t-elle.
DECIEM s’est par ailleurs récemment lancée sur TikTok Shop aux États-Unis, indique Nicola Kilner, et cela s’est avéré être « un succès significatif » jusqu’à présent. « Nous n’étions pas sûrs, au départ, de la date de lancement, car il s’agit d’un nouveau canal, mais il s’avère que les consommateurs veulent faire des achats sur TikTok. » L’entreprise prévoit d’ouvrir prochainement des pourparlers en vue d’un développement plus large sur TikTok Shop, notamment au Royaume-Uni où la plateforme est également opérationnelle.
Les ventes en magasins physiques demeurent toutefois un axe de croissance important pour DECIEM et The Ordinary, a-t-elle déclaré. « Nous voulons absolument continuer à assurer une forte sur ces deux axes », ajoute Nicola Kilner, car de nombreux consommateurs apprécient toujours de tester les produits en magasin et de bénéficier de conseils d’experts.
Pharmacies et magasins en propre
Astrid de la Noue, directrice régionale EMEA chez DECIEM, précise que le développement dans des lieux de vente entièrement nouveaux est également à l’ordre du jour.
« Il y a encore beaucoup d’espaces que nous n’avons pas investis — la pharmacie est l’un d’entre eux et nous pensons qu’elle présent de grandes opportunités pour nous à long terme », explique-t-elle.
The Ordinary a déjà commencé à déployer ses produits dans les pharmacies en France et d’autres déploiements stratégiques auront lieux dans la zone EMEA. Astrid de la Noue souligne toutefois à quel point ces lieux de vente sont « très différents » du commerce beauté spécialisé. « Nous voulons que cela se fasse, et nous voulons que cela se passe bien. Il y a beaucoup à faire sur ce à quoi ressemblera le merchandising visuel et le soutien que nous pourrons obtenir des pharmaciens eux-mêmes. En fin de compte, notre objectif est d’être la marque de soins de la peau numéro un dans la région EMEA. »
Selon elle, The Ordinary souhaite également ouvrir ses propres magasins à Paris et dans d’autres grandes villes européennes au cours des deux ou trois prochaines années, afin d’offrir aux consommateurs un espace où ils pourront « se faire une idée précise de la marque » et « s’immerger en profondeur » dans le concept et les produits. « Depuis la pandémie, il y a une tendance au retour au commerce de détail et une soif de conseils ».
Mais Nicola Kilner insiste, les achats en ligne restent tout aussi importants pour la marque que les achats en magasin. « Chez The Ordinary, nous croyons beaucoup à l’accessibilité et au choix ».
Et pour elle, ce dernier point, le choix, est d’autant plus important aujourd’hui, que les consommateurs de produits de beauté détiennent un pouvoir important sur les marques.
Plus transparent que jamais
Aujourd’hui, les consommateurs continuent « plus que jamais » de questionner les marques sur la base scientifique de leurs formules, leur impact environnemental global et, plus largement, sur leurs valeurs sociales. Ainsi, les marques de beauté doivent aujourd’hui être plus transparentes que jamais – dans tous les aspects de leur activité – car les consommateurs vérifient scrupuleusement tous ces points.
« Je crois que les consommateurs ont plus de pouvoir que les marques », dit-elle.
Interrogée sur l’impact que cela pourrait avoir sur les plans de croissance et d’innovation de DECIEM, Nicola Kilner explique que s’il y a un domaine dans lequel elle souhaiterait en faire davantage c’est celui de « faire le bien ». Cela concerne « la durabilité, la manière dont nous faisons des dons, l’impact social que nous avons, la manière dont nous faisos entendre notre voix, car le monde semble de plus en plus difficile à comprendre depuis quelques années (…) C’est une bonne chose que les marques et les grandes entreprises utilisent leur taille, leurs bénéfices et leur voix pour faire davantage de bien. »
La santé mentale et la défense des communautés marginalisées, ajoute-t-elle, sont aussi des domaines dans lesquels DECIEM et ses marques souhaitent faire davantage.