Premium Beauty News - Cela fait donc près de dix ans que vous vous êtes attelé à la tâche ?
Nick Thorne - Effectivement, dès 2002, nous avons commencé à nous pencher sérieusement sur cette question du développement des produits respectueux de l’environnement. Très vite, nous avons débouché sur les notions d’analyse du cycle de vie et commencé nos études sur la mesure de l’impact des emballages. Sans les chiffres il est très difficile de voir la vérité !
En 2007, il était clair que le développement durable serait l’un des piliers de notre stratégie aux côtés de l’innovation et de la performance opérationnelle de notre réseau industriel mondial.
Notre engagement a consisté à mettre en avant les programmes, les initiatives et les outils que nous avons construits. Ensuite nous avons réfléchi aux grands enjeux sur lesquels nous voulions axer notre stratégie et nous avons commencé à construire des partenariats avec certains clients, certains fournisseurs et, même, certains concurrents. D’une manière générale, nous avons abordé le sujet sous un double aspect : celui de l’impact direct sur l’environnement et l’augmentation des gaz à effet de serre, et celui, plus large, du développement durable.
Un autre aspect tout aussi important n’a évidemment pas été négligé dans notre démarche, c’est celui de notre responsabilité en matière d’achat de matières premières auprès de nos fournisseurs, la maîtrise de l’énergie que nous consommons et celle de notre capacité à engendrer des déchets. Je vous rappelle qu’Albéa est également partenaire d’Ecovadis qui fournit la première plateforme collaborative permettant aux entreprises d’évaluer les performances environnementales de leurs fournisseurs dans le monde entier. Depuis son lancement en 2007, plus de 25 groupes ont choisi cette plateforme pour gérer les risques RSE liés à leur chaine d’approvisionnement et améliorer la performance développement durable de leurs fournisseurs.
Premium Beauty News - Les clients étaient-ils véritablement motivés à l’époque ?
Nick Thorne - Honnêtement, la motivation était très diffuse et quelque peu déséquilibrée jusqu‘en 2006. Et puis, il faut reconnaître qu’il y a eu une nette accélération à partir de 2008 puis 2009. Aujourd’hui, le sujet est majeur.
Premium Beauty News - Sur quoi travaillez-vous précisément ?
Nick Thorne - Nous travaillons évidemment sur la conception d’emballages plus respectueux de l’environnement et, comme je vous l’ai dit, sur la réduction de l’impact de nos activités industrielles mais aussi sur notre responsabilité sociale.
Aujourd’hui, nous sommes en mesure de proposer à nos clients des solutions packaging utilisant moins de matières ou intégrant de nouveaux matériaux et, même de mesurer et comparer, grâce à un outil informatique d’Analyse de Cycle de Vie que nous avons spécialement développé, leurs impacts respectifs sur l’environnement.
Je vous donne un exemple concret, celui de la réduction de l’impact environnemental de l’ordre de 30 % d’un tube standard grâce à un travail sur son bouchage. Nous avons également développé le tube ENCORE qui contient 60 % de matières recyclées. Autre exemple, les ingénieurs de la société Betts, qui nous ont rejoints, ont mis au point un nouveau procédé concernant les tubes laminés permettant de plus facilement se passer de suremballage carton dans le domaine du dentifrice par exemple. Il s’agit d’une nouvelle technologie simplifiée pour la fabrication des jupes sans feuille d’aluminium, qui ont la capacité de reprendre leur forme initiale en cas de choc. Je peux aussi vous citer tel mascara que nous avons mis au point avec une grande marque de produits cosmétiques et qui, dans sa conception, a permis de diminuer de 30 % son impact sur l’environnement.
Premium Beauty News - Biodégradabilité, compostabilité, utilisation de bio-polymères ou de matières recyclées… Le champ est large !
Nick Thorne - Oui, très large ! Mais il faut être pragmatique. Dans la mesure où le recours aux biopolymères n’est pas encore opérationnel, il vaut mieux se tourner vers des solutions efficaces , immédiates, et entre nous, essentielles comme la réduction du poids des emballages, l’incorporation de matières recyclées etc. De ce fait, nous réduisons la quantité de matière utilisée, par allègement ou éco-conception. Nous remplaçons certaines matières par d’autres et nous mesurons l’impact global de chaque solution pour la comparer aux solutions existantes. Ce qui est important, également, c’est de travailler avec des matières premières recyclées qui sont en quantités suffisantes, de qualité "alimentaire", et esthétiquement apte à nos applications. Ceci est désormais le cas pour le HDPE, mais n’est pas encore vrai pour d’autres matières techniques importantes comme l’ABS que nous utilisons beaucoup.
Ce qui ne veut pas dire que le travail sur les biopolymères ne nous motive pas. Je vous rappelle qu’avec le soutien des pôles de compétitivité Plastipolis et IAR, nous avons initié le projet de recherche et développement Thalia qui réunit un consortium de dix industriels de la plasturgie française et deux laboratoires de recherche (INSA Lyon et l’ESIEC).
Ce projet d’une valeur de 4 millions d’euros avec l’aide de l’État et des collectivités territoriales, vise à mettre en place des solutions innovantes pour le développement de produits éco-conçus, au moyen d’un outil d’éco-conception permettant de combiner des designs innovants avec des nouveaux matériaux adaptés (dont les bioplastiques), d’apporter des gains environnementaux tout en respectant les exigences fonctionnelles et techniques des produits concernés, et de prendre en compte les contraintes économiques et sociétales du marché.
Les retombées positives du projet Thalia, pourront se refléter à plusieurs niveaux :
– Réduction significative de l’impact environnemental des emballages plastiques,
– Protection de plusieurs milliers d’emplois en France dans le secteur de l’emballage plastique,
– Augmentation du chiffre d’affaires des différents partenaires.